Nadi Shodana est une pratique de Pranayama (maitrise du Souffle) qui signifie, en Sanskrit, « la purification des nadis ».
Les nadis constituent les canaux dans lesquels notre énergie vitale circule. Comme il existe 72000 canaux dans le corps énergétique, on peut se demander si Nadi Shodana va les purifier tous ?
Dans leurs pratiques, les Yogis s’intéressent surtout à trois canaux essentiels : le canal central (appelé Sushumna) et les deux canaux latéraux, Ida et Pingala qui, par définition, jouxtent le canal central. Nadi Shodana va permettre de purifier les deux canaux latéraux. Cette pratique ne concerne donc pas le canal central à l’intérieur duquel rien ne circule (ni souffle, ni goutte) et ce, jusqu’à l’extrême fin de notre vie.
1. Pourquoi est-il nécessaire de purifier les canaux ?
Il n’y a pas de phénomène qui puisse se déployer dans notre esprit sans qu’un souffle énergétique ne le supporte. Ainsi, une pensée, un souvenir, ou une image mentale nécessite toujours un souffle subtil qui le soutient, tout comme le cheval soutient le cavalier et lui permet d’avancer.
Dans notre journée, ces souffles subtils circulent constamment dans les deux canaux latéraux. Parfois, il nous arrive de générer d’excellents états mentaux, tels que des pensées d’amour, d’altruisme, de générosité, de patience… De tels états mentaux purs sont supportés par des souffles subtils purs. Ces états mentaux excellents constituent des causes de bonheur futur.
Malheureusement, il nous arrive aussi de générer des états mentaux négatifs qui sont l’exact contraire de ceux qui viennent d’être nommés. Ces émotions et pensées incorrects viennent ainsi souiller les souffles subtils qui les soutiennent. Il en résulte que ces canaux se trouvent « pollués » par ces souffles subtils souillés.
Ceci a une grande importance car si nous n’évacuons pas ces souffles souillés, malgré toutes nos bonnes intentions, nous allons involontairement, mais immanquablement, générer de nouveaux états mentaux négatifs, causes de souffrances futures. On peut se représenter nos deux canaux latéraux à l’intérieur desquels circulent des souffles souillés de la façon suivante (cf. dessin ci-dessous).
Le dessin suivant montre l’état des canaux une fois qu’ils ont été purifiés par Nadi Shodana.
2. Quel principe rend possible la purification des souffles ?
On peut logiquement se demander : « Mais comment un tel processus de purification peut-il s’accomplir ? Quel ressort permet d’éliminer ces souffles souillés ? »
La réponse à cette question essentielle va nous permettre de comprendre pourquoi la pratique authentique du Yoga permet d’obtenir des bienfaits considérables, autrement plus puissants que ceux de la gymnastique.
Pour les Yogis, il existe un principe fondamental : l’esprit maitrise l’énergie. Il a le pouvoir de contrôler les souffles subtils qui circulent dans notre corps énergétique. Il lui est ainsi possible d’évacuer les souffles impurs et de conserver les souffles purs. Et c’est précisément ce que nous faisons avec Nadi Shodana.
3. Comment mettre en œuvre Nadi Shodana ?
• Les préalables nécessaires
Pour mettre en œuvre Nadi Shodana il faut préalablement avoir rempli certaines conditions :
- Le corps est placé en posture méditative.
- On a généré une excellente motivation
- La respiration en trois parties se trouve placée.
Il est possible d’avoir une pratique plus ou moins élaborée de Nadi Shodana, comme nous allons le détailler maintenant.
• Sollicitation du corps physique
Placez l’index et le majeur de la main droite au milieu du front. Fermez la narine droite avec le pouce et inspirez à gauche. Quand les poumons sont pleins, fermez à gauche avec l’annulaire et expirez à droite. Quand les poumons sont vides, inspirez à droite. Puis fermez à droite et expirez à gauche.
Placer index et majeur au milieu du front permet de placer très facilement le pouce sur la narine droite et l’annulaire sur la narine gauche. Si cela est plus facile pour vous, vous pouvez vous en dispenser, cela ne change rien à l’efficacité de la pratique.
Ceci constitue un cycle. On effectue trois cycles consécutifs.
Comme on le voit, cette façon de pratiquer mobilise essentiellement le corps physique.
• Mobilisation du corps physique et du corps énergétique
Dans cette façon de procéder, en plus de l’exercice précédent, on visualise la circulation des souffles subtils dans les canaux latéraux.
Ainsi, à l’inspiration, on visualise un souffle subtil de couleur blanche qui entre par la narine gauche, monte à la racine du sourcil gauche, pénètre à l’intérieur du crâne, descend le long de la colonne vertébrale, parvient quatre travers de doigts sous le nombril et passe dans le canal de droite. A l’expiration, on visualise l’inverse : la circulation d’un air grisâtre qui emprunte exactement le chemin, mais en sens inverse, dans le canal de droite : du point de jonction des canaux, quatre travers de doigts sous le nombril, un souffle subtil de couleur grisâtre remonte par le canal de droite et sort par la narine droite.
Selon le même processus, on inspire alors à droite et on expire à gauche.
Cela constitue un cycle. On effectue trois cycles consécutifs.
• Sollicitation du corps physique, du corps énergétique et de l’esprit
A la pratique précédente, on ajoute une pensée. On imagine, sur l’inspiration, que le un souffle subtil blanc est parfaitement pur : il sera le support d’excellents états mentaux qui permettront d’expérimenter le bonheur, ainsi qu’une excellente santé.
A l’expiration, on pense que le souffle subtil grisâtre qu’on évacue représente les maladies et causes de maladies.
Cela constitue un cycle. On effectue trois cycles consécutifs.
• Moindre mobilisation du corps physique
Enfin, il est tout à fait possible de pratiquer sans se servir du tout de la main, simplement en étant concentré et en visualisant la circulation des souffles à l’intérieur des canaux.
A l’inspiration, on visualise un souffle subtil pur qui entre par la narine gauche, descend quatre travers de doigts sous le nombril et passe dans le canal de droite. A l’expiration, un air grisâtre remonte par le canal de droite et sort par la narine droite.
On inspire ensuite à droite et on expire à gauche.
Ceci constitue un cycle. On effectue trois cycles consécutifs.
Dans cette façon de procéder, il est plus particulièrement fait appel au corps énergétique et à l’esprit. Les canaux se trouvent purifiés essentiellement par le pouvoir de la visualisation et de la concentration. Le corps physique se trouve toutefois sollicité (adoption de la posture méditative et maitrise de la respiration), mais dans une moindre mesure.
Les deux dessins suivants montrent comment procéder :
Inspir à gauche, puis expir à droite |
Inspir à droite, puis expir à gauche
Parmi ces différentes façons de procéder vous vous demandez sans doute comment effectuer votre choix.
Pour vous familiariser, il est tout d’abord nécessaire de suivre l’ordre qui vous a été proposé plus haut. Quand ces méthodes vous seront familières, vous adopterez celle qui vous convient le mieux, c’est-à-dire qui vous permet d’obtenir les meilleurs résultats.
Comme nous l’avons indiqué, trois cycles de Nadi Shodana suffisent à purifier les canaux. Aussi n’est-il pas nécessaire d’en accomplir plus.
4. A quel moment pratiquer Nadi Shodana ?
On peut répondre à cette question de la façon suivante : chaque fois que l’on souhaite apaiser l’esprit, se débarrasser de pensées négatives, faire apparaitre des états mentaux excellents qui nous permettent d’être heureux.
Par conséquent, il est indispensable d’accomplir Nadi Shodana au tout début de votre séance de Yoga, juste après avoir généré une excellente motivation. Et vous pouvez aussi accomplir cet excellent exercice même si vous ne comptez pas ensuite accomplir une séance compète de Yoga. Soyez souple, dans votre pratique et pragmatique : si sur votre lieu de travail, le seul endroit où vous puissiez être un peu tranquille et isolé ce sont les toilettes, qu’est-ce qui vous empêche d’y mettre en œuvre Nadi Shodana. Personnellement, j’ai procédé ainsi de façon discrète et efficace.
Bien sûr, vous pouvez l’accomplir le matin, au lever, et ceci orientera positivement votre journée. En fin de journée, avant d’aller vous coucher cela préparera votre esprit pour une excellente nuit de repos. Vous pouvez vous y adonner plusieurs fois par jour, il n’y a pas de contre-indication à cette pratique.
5. Les résultats obtenus
Nadi Shodana permet rapidement d’avoir un esprit beaucoup plus paisible. En effet, puisque les souffles subtils souillés ont été évacués, les pensées négatives récurrentes se trouvent alors temporairement mises à distance.
A l’inverse, l’apparition des excellents états mentaux, l’amour, la générosité, l’éthique, la tolérance, la concentration, se trouve favorisée puisque ne circulent plus que des souffles subtils purs.
Ayant généré, au début de notre séance, une excellente motivation, ces états mentaux vont ainsi pouvoir demeurer et les effets de toutes nos pratiques seront alors puissants et bénéfiques. Nadi Shodana agit ainsi comme une véritable protection de notre esprit.
A contrario, si on n’accomplit pas Nadi Shodana les états mentaux excellents que nous venons de générer ne pourront pas demeurer et toute notre pratique s’en trouvera ainsi corrompue.
Avec quelle puissance du souffle pratiquer ?
Même si cette pratique est bénéfique, dans la mesure ou notre esprit est très agité, pour que celui-ci acquiert une grande puissance, il sera extrêmement bénéfique de la poursuivre en s’entrainant pendant quelques minutes à la concentration.
Conclusion
Il nous est très facile de nous rendre compte par nous-même de l’importance de Nadi Shodana. Sans elle notre esprit est instable et vagabonde. Durant notre séance de Yoga nous ressassons nos préoccupations quotidiennes et anticipons les événements futurs. Notre séance de Yoga ne nous mène finalement nulle part.
Installé en posture méditative on effectue trois cycles de respirations alternées de notre choix. Ceci ne nous prend même pas deux minutes.
Mise en œuvre au long cours, cette pratique deviendra rapidement une aide précieuse pour ne pas être envahi par des états mentaux négatifs. Elle constitue une excellente pratique préparatoire aux autres entrainements du Yoga, que ce soit la concentration, la méditation, ou simplement la mise en œuvre de vos postures favorites.
Christian Ledain
Professeur de la Fédération Française de Hatha Yoga